J’ai envie de partager avec vous cette interview magique de Jacques Brel, que j’avais téléchargée sur Napster à l’époque (et oui ça remonte) et que j’ai écoutée à nouveau, en vidéo cette fois-ci, il y a peu.

Il s’agit d’ailleurs plus d’un entretien que d’une interview de Jacques Brel ; on se sent proche de l’homme, de par son accessibilité et sa sincérité.

On n’est pas forcément d’accord avec tout ce qu’il dit, mais, il n’y a plus d’hommes qui parlent comme ça aujourd’hui ; je veux dire, qui parlent avec cette étonnante honnêteté vis à vis d’eux-même, Gitane sans filtre à la bouche et demi à la main.

Cet entretien, réalisé par le journaliste Henry Lemaire au printemps de l’année 1971 à Knokke, dans le bar-club The Gallery, est le superbe témoignage d’une grande âme, sur le voyage de la vie.

L’interview de Jacques Brel

Écoutez cette vidéo quand vous avez un moment, je dis bien écoutez car, elle peut se regarder les yeux fermés.

Il y a de nombreux passages dans cette vidéo qui sont de superbes leçons de philosophie. Des leçons simples, vraies, sincères. Et ça fait du bien.

Si certains des propos de Jacques Brel peuvent paraître misogynes, chez Ces gens là qui se choquent pour un rien, ce n’est pas du tout comme ça que je les perçois ; il est évident que c’est un homme qui aimait les femmes ! Un misogyne ne peut résolument pas écrire “Ne me quitte pas“.

Si certaines paroles peuvent prêter à confusion et seraient aujourd’hui bannies de n’importe quelles ondes, ce n’est que parce qu’il parle librement, sans craintes ni complexes ; on ne chante pas “A mon dernier repas” sans courage.

Si certaines réflexions scandaliseraient l’opinion, il n’en reste pas moins que ce sont les paroles d’une expérience profondément intelligente de la vie, les propos intemporels d’un homme qui est resté un sale gamin talentueux, car on ne vit pas ses chansons comme il les vivait sur scène, sans croire à ce qu’on dit.

Les plus belles leçons

Voici une petite sélection de mes passages favoris, de ceux qui font le plus écho en moi, de ceux qu’il faut garder à l’esprit dans la vie.

“J’vends des bretelles encore deux ans, mais alors en Septente-Trois, j’écris un livre.”

“Un homme qui n’a pas peur, c’est pas un homme (…). Qu’on n’vienne pas m’dire qu’un type n’a pas peur. C’est un fou ! Faut l’enfermer !”

“La bêtise. Ah la bêtise c’est terrible. C’est la mauvaise fée du monde.”

“Avec les femmes, on a d’la passion, d’la patience… Et puis des r’mords.”

“Un homme passe sa vie, à compenser son enfance.”

“J’trouve que la Belgique vaut mieux qu’une querelle linguistique.”

“C’qu’il y a de plus dur pour un homme qui habiterait Vilvorde, et qui veut aller vivre à Hong Kong, c’est pas d’aller à Hong Kong, c’est de quitter Vilvorde. C’est ça qui est difficile. C’est QUE ÇA qui est difficile !”

A la question “Que respectes-tu le plus? Comme sentiment bien sûr“, Brel relève la tête, souriant à pleine dents avec un regard pétillant qui trahit son immense intérêt pour la question, et répond après un silence :

“La fidélité de certains hommes vis à vis d’autres hommes, ça, ça m’émeut aux larmes. Ça m’émeut aux larmes ! J’trouve ça beau, j’trouve ça noble, j’trouve ça très supérieur à tous les autres sentiments.”

Il craque une allumette et se rallume encore une Gitane sans filtre.

Je comprends tellement de quoi il parle dans le passage où j’ai extrait cette dernière citation.

Ça me fait penser à mes cinq plus vieux potes : Thib, Dainj, Néné, Guitou et Mozy. Nous sommes tous unis les uns aux autres, depuis toujours, par cette “Fidélité” dont parle Jacquo – comme on l’a toujours appelé entre nous lorsqu’on le citait en imitant l’accent belge.

Petite aparté

Je veux faire une petite aparté sur ce billet qui est mon 300ème article sur le blog.

Je me suis demandé si je devais publier un article “spécial” pour l’occasion. Et puis j’avais celui-ci – sur l’interview de Jacques Brel – dans mes brouillons. J’ai décidé que ce serait mon 300ème article.

Parce que j’aime Jacques Brel ! Il “m’émeut aux larmes !” Et j’aime la Belgique et sa belle Bruxelles dans laquelle j’ai passé cinq superbes années de ma vie ! Que Bruxelles manque au petit Parisien que je suis ! Que les soirées Duvel et Rochefort de la Taverne du Manneken Pis me manquent !

Taverne Manneken Pis

La Taverne le Manneken Pis à Bruxelles

J’en ai passé des soirées dans cette taverne, à parler avec Serge, José, Pénélope et le jeune Kenny, mon frangin et mon vieux pote Thib.

C’est dans cette Taverne que j’ai fêté la naissance de mon fils avec champagne offert par la maison (j’ai gardé la bouteille).

Les retours nocturnes à la maison, en passant à pied par la Grand’ Place ou par la rue des Brasseurs où Verlaine a tiré sur Rimbaud, me manquent aussi beaucoup.

Aaah ce bon vieux plat pays de Jacques Brel !

Pour conclure cet article

Et pour faire le lien avec la collection qui est un des thèmes principaux du blog, je vous présente quelques-unes de mes lithographies de Jacques Brel et de sa femme, Maddly Bamy, qu’il rencontre justement la même année que celle de l’entretien, en 1971.

Je dois avoir une bonne centaine de lithographies signées Moretti, Sciora, et MB (pour Maddly Bamy).

En 1974, Jacques Brel et Maddly Bamy sont partis à la voile faire un tour du monde, ils se sont arrêtés aux îles Marquises, où Jacques Brel écrira sa chanson Les Marquises, et où Maddly fera de nombreux dessins et croquis.

Voici quelques uns des croquis de Maddly Bamy

Jacques Brel aux Marquises - Maddly Bamy

Jacques Brel aux Marquises – Maddly Bamy

Maddly Bamy

Maddly Bamy

Jacques Brel aux Marquises

Jacques Brel aux Marquises

Quelques lithographies de Moretti

Dans le port d'Amsterdam - Moretti

Dans le port d’Amsterdam, y’a des marins qui chantent – Moretti

Avec Élégance-Moretti

Avec Élégance – Moretti

Et quelques-unes des lithographies de Sciora

Jacques Brel - Sciora

Jacques Brel – Sciora

Jacques Brel - Sciora

Jacques Brel – Sciora

Il y a encore quelques jours, j’ai fait découvrir à mon fils la chanson “Les Bonbons“. A chaque “Je vous ai apporté des bonbooons”, mon p’tit gars de 3 ans se tapait un fou rire comme si Jacques disait un mot interdit. Moi qui quand j’étais petit, dans la voiture de mon père écoutait les albums de Jacques lors des longs trajets, et bien ça m’émeut aux larmes !